Vendredi 22 août 2008.
(en toute logique, ce devrait être la date exacte, pour autant que je n’aie pas physiquement changé d’horizon spatio-temporel depuis mes dernières heures au Bureau ; mais la nuit blanche fait de mon cerveau une pulpe telle que je ne réponds de rien)
(une chose est sûre, les passagers de mon wagon – lui-même partie d’un TGV lent et bon marché qui se glisse de Paris vers Avignon – les passagers de ce wagon semblent être la proie de fous rires soudains et nerveux tout à fait inquiétants ; ce couple en particulier, la trentaine, sis une rangée derrière moi et de l’autre côté de l’allée centrale, tous deux s’emploient depuis un bon moment désormais à nous régaler de leurs gloussements stridents, qu’ils peinent à étouffer tant ils sont prêts de la crise de nerfs)
(j’ai glissé par intermittences dans le brouillard et le chaos, depuis le départ à la gare de Lyon – pot-pourri d’idées prématurées et difformes, bigleuses bruyantes et indistinctes – régulation de monopoles, oui, je suis allé jusqu’à rêver de monopoles régulés – dans les sièges devant moi deux gamins blonds dont plusieurs indices trahissent la scandinave ascendance ne tiennent pas en place eux non plus, chantent, chuintent, crapahutent et soufflent – derrière la vitre un soleil en phase terminale, qui m’aura parfois diverti en de spectaculaires mises en scène dans les vastes plaines de France, entrechats avec souples nuages bas déchirés mais rayonnants – et ce goût de plâtre ou de tartre ou de martre (pour ce que j’en sais) me colle au palais comme de la naphtaline zibelinée échappée du placard de la chambre d’amis – et il m’est encore difficile de donner un sens quelconque à la situation présente, sachant qu’une nouvelle fois mes affaires – mes cliques, mes claques et mes cordes – se sont vues tirées de la poussière tranquille des jours sans fin, extirpées du quotidien par une autre mutation de ma vie, tandis que moi-même suis en chemin vers d’irréels ailleurs – à noter que le manque de sommeil ne me prive pas de la capacité de suivre mon fil effiloché d’écrits, alors que la lecture est bien plus ardue)