Jour 3

eye-illus


Réveil douloureux ce matin. Muscles des globes oculaires épuisés. J’ai dû rêver trop fort.


« Deux destins contrariés ». Comprendre : les deux malheureux patrons d’une gigantesque entreprise de télécommunication française se voient forcés de démissionner, suite à de mauvais résultats financiers. Un homme et une femme. Sur la première photo que je vois d’eux ils posent de profil, l’air dynamique et juvénile ; sur celle de la page suivante, je comprends que c’était à cause de la mauvaise qualité de l’impression. En vérité ils sont vieux et moches, ridés, permanentés, amidonnés, comme il se doit. Ils ouvrent de grands yeux tristes sur la brutalité du monde : eux qui se sont livrés corps et âme à l’Entreprise, les voilà jetés comme des malpropres. Encore heureux que Serge et Patricia aient chacun obtenu, pour leur départ, une « prime » qui – on l’espère pour eux – devrait leur permettre de s’acheter des yaourts de temps en temps chez Leader Price : respectivement 5.6 et 5 millions d’euros.

Mais le plus beau, c’est que ces primes représentent « deux années de salaires fixes et variables ». Ça ne vous fait pas rêver, l’idée d’un salaire à la fois fixe et variable ? Comme un soleil noir. Un Tibet libre. Un politicien vertueux. Comme ça doit être beau, un salaire fixe et variable.

* reflets brillants sur la toile
mordorée d'un parachute,
lentement à la dérive,
dans l’atmosphère jaunâtre
et le doux carboné monoxyde
de la Défense *


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La machine à café. Evidemment. Oui, je vais parler de la machine à café, j’irai jusque-là. A droite de la machine à café, ou plutôt à gauche de la machine à café depuis le point de vue de la machine à café, il y a la vitre, et derrière la vitre il y a le vide, l’extérieur, le dehors, le reste. Et sur la vitre, de petites marques de sébum rondes à différentes hauteurs, à l’endroit où les gens se sont appuyés le front, ou le nez. Pour regarder ailleurs.